Un parrain deux par deux

Mardi 15 juin 2010, par Anna, Ivan Joseph // La danseuse de vélo

Je vais vous parler.
C’est très délicat de vous expliquer tout ça.
En plus, ça se complique. J’ai beaucoup réfléchi, vous savez. J’ai beaucoup réfléchi à tout ça. Depuis.
C’est vrai qu’il y a des choses vraiment étranges, que des choses vraiment étranges se sont passées, se sont produites, ont eu lieu.
Enfin, les choses étaient compliquées. C’était un peu spécial. Mais, c’est vrai, là, je ne vous explique rien.
Devrais-je commencer par vous parler de mon mariage ? Si vous saviez ! Oui, figurez-vous, le jour de mon mariage, moi, je savais ; je savais déjà. C’est absurde, n’est-ce pas : pourquoi fait-on des choses, comme irrésistiblement, alors que l’on sait pertinemment que l’on connaît déjà la suite ?
C’est très difficile de vous raconter ça. Il y a une histoire de parrainage. Vous savez, les parrains et les marraines, dans les familles.
Eh bien, moi, je me suis mariée avec le filleul de ma mère... dont le père - écoutez bien ça ! oui, le père !... - était mon parrain. Vous imaginez un peu le lien invisible. Parfois, je me pose cette question : mon mari n’était-il pas un peu mon frère, une sorte de frère ? Ce qui aurait pu faire de mon mariage une sorte de mariage... Comment dire ?... Je ne sais pas comment le dire mais je sais que, le jour même de mon mariage, déjà, je le savais...
Là, c’est étrange, mais, tout à coup, je ne peux pas m’empêcher de penser à mon fils, à l’enfant que j’ai eu avec cet homme.
Le lien invisible serait-il encore là, entre mon fils et moi ? Est-ce ce lien, cette attache qui, parfois, me...
... me rend les choses si difficiles à vivre, à décider (j’allais dire : à vivre parce qu’à décider) ?
Je suis très troublée. Je crois que j’ai besoin de me reposer. Je crois que c’est ce que je vais faire ; que cela, d’ailleurs, le repos, peut aussi relever d’une décision ; et que, par surcroît, ce peut tout aussi bien en être une excellente !

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