Fluides - Partie I - § I
Lundi 8 août 2011, par Fluides ou Le singulier pluriel
//Il est vrai que ce jour-là un certain sentiment de renouveau
animait le cœur d’Élisabeth. Mais après tout, bien peu de
gens s’en vont visiter un nouvel appartement, lorsqu’ils en cherchent
un, sans ce léger vertige d’excitation pour l’inconnu qui
s’ouvre alors à eux. Et les questions, dans un pareil
état, de se bousculer irrésistiblement en leur esprit :
« Vais-je finalement choisir ce logement-là ? »,
« Sera-ce, cette fois, la véritable habitation de mon
bonheur ? », « Me maudirai-je, au contraire, un jour,
d’avoir fait un tel choix ? », et cætera.
De toute façon, il ne restait plus à la jeune femme qu’un
mois et demi pour hésiter, dans la mesure où son actuel
bailleur lui avait déjà donné son préavis
depuis le même délai. Le temps pressait.
Aujourd’hui, elle se rendait au 95, rue des Martyrs, dans le 18e arrondissement de Paris.
La rue des Martyrs s’étend en fait - l’on devrait plutôt dire monte - sur deux arrondissements : le 9e et le 18e. Au numéro 95, l’on
se trouve dans la partie la plus haute de la voie, coincé entre
la rue Vieuville et la rue Yvonne-Le-Tac ; pas très loin du
Sacré-Cœur, et à deux pas de la station de métro
Abbesses.
Élisabeth avait raison, pour cette fois, de penser que cette
visite allait peut-être changer sa vie. Simplement, elle
était loin d’imaginer de quelle façon et à quel
point ; loin de se douter en quoi le fait d’être à
quelques heures de choisir cet appartement du quatrième
étage de ce modeste immeuble du 95 de la rue des Martyrs, devant
lequel elle se trouvait à présent, allait être -
sans doute associé à quelque autre caractéristique
propre à sa nature - le catalyseur de toute cette étrange
histoire dont il s’agit maintenant de faire le récit dans ces
pages.
Tout est cependant déjà dit, à peu de choses
près. Peut-être, certes, n’a-t-il pas encore
été précisé qu’Élisabeth ne
possédait pas de voiture. Oui, il est pourtant nécessaire
de le dire. Ou finalement, non ! En fait, l’essentiel est sans doute
davantage d’indiquer que, pour se rendre à ce rendez-vous
proposé par l’agence, elle était venue en métro.
La vie tient tout de même à bien peu de choses...
P.-S.
Fluides - Partie I - Chapitre I