Fluides - Partie II - Chapitre XIII

Vendredi 4 janvier 2013, par Ivan Joseph // Fluides ou Le singulier pluriel

Malgré sa réelle fatigue, Pascal eut paradoxalement beaucoup de mal à dormir cette nuit-là. Une fois couché, dans l’obscurité, il ne cessa de ressasser les différents éléments qui, selon lui, expliquaient l’impasse dans laquelle il se trouvait à présent. Synthétiquement, ceux-ci pouvait se résumer à la conclusion suivante : à un moment - peut-être dès le début, même -, il avait arrêter de prendre appui sur la réalité. C’était comme s’il avait voulu lui imposer les repères, aussi bien spatiaux que temporels, de son imagination, quand, à l’origine, il n’avait pour seul projet que de s’inspirer de celle-là pour alimenter celle-ci. Inéluctablement, puisque, aussi bien, dans l’établissement d’un tel dialogue entre réalité et imagination, c’était forcément la première qui gardait le dernier mot, il se trouvait rappeler par elle à l’ordre de son principe.
Une circonstance bien réelle pourtant mit alors Pascal sur la piste de l’échappatoire qu’il lui était encore peut-être possible de saisir : annuler son premier égarement par un nouveau virage diamétralement opposé. Cette circonstance fut le passage à l’heure d’été qui devait se faire cette nuit-là. Lorsque Pascal constata qu’il était toujours éveillé à deux heures, moment à partir duquel il devait en fait dorénavant être trois heures, sa réflexion fut amenée à se focaliser sur le problème de la compatibilité entre les deux temps qui se trouvaient en conflit dans l’expérience de Fluides : le réel, celui de l’enquête de la Brigade, et l’imaginaire, celui de la fiction qu’il avait commencé à écrire à son sujet. Il comprit enfin, alors, que c’était à ce point que le bas blessait. Mais oui ! Bien sûr ! Aujourd’hui que, d’une part, l’enquête piétinait, que la Brigade rencontrait notamment, semblait-il, ce gros problème de fonctionnement, avec la démotivation aussi soudaine qu’inexpliquée de Varennes - enquête qui, elle-même, soit dit en passant, était par ailleurs commencée depuis bien plus d’un an déjà -, alors que, d’autre part, l’année universitaire filait toujours auusi bon train, avec les premiers partiels de fin d’année qui pointeraient déjà leur nez dans moins d’un mois et demi, évidemment, cela ne pouvait plus coller ! Évidemment, cela coinçait !
Au moins, cette nuit-là, Pascal put se réjouir du fait qu’il s’en était enfin rendu compte. C’était comme s’il reprenait connaissance. Cela ne resolvait certes en rien ce problème d’incohérence qui lui paraissait à présent évident. Pour le moins, il avait désormais davantage de chance, sinon de le corriger immédiatement, tout au moins de cesser de l’alimenter.

P.-S.

Fluides - Partie II - Chapitre XIII

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