Germe

Vendredi 25 décembre 2009, par Anna, Ivan Joseph // La danseuse de vélo

Jeanne a trente ans. Exactement trente ans. Elle est à genoux. Elle prie. L’on sait tout cela... à travers la porte.
Comment pourrait-il en être autrement ? Que pourrait-elle bien faire d’autre que prier ? Qu’est-ce que prier pour Jeanne ?

Jeanne, un jour, s’est enfermée pour cela, pour ce geste. Son existence est comme symbolisée par lui : Jeanne est prière...

Il lui est interdit de faire autre chose. Au moins, ici, de ce côté-ci de la porte, de la lourde porte en bois, en bois massif, c’est possible. C’est possible...
C’est possible...

Malheureusement, c’est ainsi...

Il lui arrive de prendre le métro aussi. À Jeanne.
Grise et debout, elle attend l’ouverture des portes du wagon lorsque la rame fait son entrée dans la station où elle descend.
Jeanne n’a jamais froid aux pieds.
Jeanne est toujours prière.

Je voulais vous parler de Jeanne, aujourd’hui, parce qu’une personne qui la côtoie depuis longtemps m’en a parlé. Cette personne m’a dit qu’il fallait absolument répondre à la prière de Jeanne, qu’il était essentiel de lui adresser un signe en retour.

J’ai pensé qu’un texte qui raconterait l’histoire de Jeanne pourrait constituer un tel signe. J’ai pensé qu’en le lisant, vous aussi ne voudriez pas laisser Jeanne sans réponse. Elle est toujours de l’autre côté de la porte, vous savez...

Et, de fait, la porte s’est ouverte, puisque vous l’avez voulu ainsi :
Jeanne se redresse. Elle sort. Elle sait déjà qu’elle ne prendra plus le métro en gris. D’ailleurs, sa prière s’est exaucée : le métro lui-même n’est plus gris. Du reste, il n’est plus même une machine. Le métro est à présent un animal qui sourit au sourire que lui adresse Jeanne.

Jeanne chevauche son ami le métro-animal et elle éclate de rire, et c’est une enfant...

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